• On ne lira plus jamais Freud comme avant… (Mikkel Borch Jacobsen)

Désormais, on ne lira plus jamais Freud comme avant…

Comment va-t-on réagir au nouveau livre de Mikkel Borch-Jacobsen intitulé Les patients de Freud ? J’entends déjà mes collègues psychanalystes : « nous savions tout ça… »

Certes, nous savions un peu… heu… depuis le Livre noir de la psychanalyse, puis surtout la somme incontournable du même Mikkel Borch-Jacobsen avec Sonu Shamdasani, Le dossier Freud, que la majorité des cas cliniques — pourquoi j’écris la majorité ? — la totalité des cas cliniques rapportés par Freud étaient « bidonnés », comme on dit dans le monde du journalisme. Nous savions aussi, sans peut-être en tirer les conséquences quant à la théorie psychanalytique, que la majorité des patients suivis par Freud s’en sont portés plus mal, parfois beaucoup plus mal. Certaines cures psychanalytiques ont tourné en lamentable tragédie. La pire de toutes, peut-être, fut celle de Horace Frink, un temps Président de la société psychanalytique de New York, qui s’est conclue par quatre morts (deux suicides et deux morts prématurées) et la destruction définitive de deux familles. On peut bien sûr penser que même sans l’intervention de Freud, tout cela se serait terminé en hécatombe… Peut-être ! Mais la part qu’y a pris Freud reste scandaleuse, y compris au regard d’un observateur de l’époque. Horace Frink était sans doute gravement malade, probablement atteint de ce que l’on appellerait aujourd’hui un « trouble bipolaire » (à l’époque « psychose maniaco-dépressive »). Freud, qui ne se souciait manifestement que des rapports de force au sein de la société américaine de psychanalyse, a délibérément utilisé l’influence qu’il avait sur son patient pour le contraindre à divorcer et à épouser la millionnaire Angelika Bijur. Il attendait de ce mariage qu’il manigançait dans le secret de son cabinet, une mainmise durable sur la société psychanalytique américaine, sur son président, bien sûr, et sa nouvelle épouse à la fortune colossale, héritière des tabacs, de la General Motors et des machines à écrire Underwood… Nous avions lu cette histoire, bien sûr, non sans un sentiment de répulsion…

timbre à l'effigie de Bertha Pappenheim, militante féministe et bienfaitrice infatigable

Nous connaissions aussi depuis longtemps la véritable identité de la fameuse Anna O., Bertha Pappenheim, la vérité de sa cure avec Joseph Breuer qui l’a conduite en asile psychiatrique durant une dizaine d’années. On peut dire avec certitude que Bertha Pappenheim a été aggravée par ces démiurges inconscients qu’étaient les psychothérapeutes de l’époque et qu’elle dut à sa créativité propre, son courage personnel et son investissement dans les luttes sociales une guérison intervenue très longtemps après sa fameuse « talking cure ». Bertha Pappenheim fut l’initiatrice du féminisme en Allemagne, une bienfaitrice infatigable et garda toute sa vie un profond dégoût pour la psychanalyse et pour Freud.

Si certaines destinées rapportées dans le nouveau livre de Mikkel  Borch-Jacobsen étaient connues, quoique pas toujours dans leurs détails, on en découvre quantité dont on ignorait tout, telles celles d’Anna von Lieben, qui subit les expérimentations hypnotico-cathartiques de Freud durant six ans, de la baronne Marie von Ferstel, qui lui fit don d’une maison de campagne pour lutter contre une constipation récalcitrante, du Baron Viktor von Dirsztay, qui finit par se suicider — suicidés comme d’autres que nous découvrons ici… Tous ceux-là et bien plus, avaient été réduits à une vignette clinique destinée à illustrer une théorie et les voilà qui s’animent devant nos yeux, surgissant de la tombe des textes comme des malemorts. Désormais, personne ne lira plus Freud comme auparavant. L’on se souvient par exemple, du fameux texte intitulé « la psychogenèse d’un cas d’homosexualité féminine »… un cas invraisemblable, qui m’avait déjà fait sursauter à l’époque où je l’avais découvert, au tout début des années ‘70’, par son caractère artificiel et contradictoire. On saura désormais que la patiente, héritière et millionnaire, Margarethe Csonka, ne s’était prêtée à la mise en scène psychanalytique que pour détourner l’attention de son père de ses attirances homosexuelles trop voyantes. La patiente se rendait tous les jours chez Freud, lui racontant ce qu’il voulait entendre, inventant littéralement des rêves et considérant ses interventions avec une condescendance distante. Elle vécut près de cent ans. Un an avant sa mort, en 1998, elle se souvenait : « Oui, bon, je n’ai pas beaucoup apprécié le Docteur Freud… Un jour, il m’a dit : ”je vous mets en rapport avec les motions les plus profondes de votre âme et vous, c’est comme si je vous lisais quelque chose à voix haute dans le journal…” » (p. 186)

Mikkel Borch-Jacobsen

On sort de la lecture de ce livre transformé. Ces êtres fabriqués, ces marionnettes de guignol qu’étaient jusqu’alors les cas cliniques de Freud, les femmes des Études sur l’Hystérie, « l’homme aux loups », « l’homme aux rats », « Anna O. », « le petit Hans » et bien d’autres, ces êtres factices seulement destinés à nous convaincre d’une théorie, sont partis en fumée, consumés par la précision de l’historien. C’est certainement l’apport le plus important du livre de Mikkel Borch-Jacobsen que de leur redonner vie — de leur restituer une vie ! — avec talent.

Au travers du récit de 31 destins, se dessine aussi une vue d’ensemble de la clientèle de Freud. Jusqu’à 1920, elle était quasi exclusivement constituée de Juifs autrichiens fortunés. Issus de la haute bourgeoisie ou de l’aristocratie, beaucoup d’entre eux étaient millionnaires, très proches culturellement de lui, auquel ils étaient parfois liés de manière familiale. Ce qui explique sans doute le nombre anormalement peu élevé de plaintes. Après la première guerre, Freud n’acceptait plus que des étrangers, des Américains, surtout, quelques Anglais, aussi, qui pouvaient payer en devises.

On sort aussi avec une conviction encore plus clairement affirmée : la psychanalyse — du moins celle que pratiquait Freud — n’était décidément pas une thérapie. Sur les 31 patients dont Mikkel Borch-Jacobsen parcourt la vie, peut-être deux — à la rigueur trois — se sont dits satisfaits du traitement. Une autre caractéristique des patients de Freud saute aux yeux : leur dépendance aux toxiques. La Cecilie M. des Études sur l’hystérie, auprès de laquelle Freud accourait à chaque crise qu’il disait soulager par l’abréaction… Il avait omis de nous préciser qu’elle était dépendante à la morphine et que ses crises, dues au manque, étaient plus soulagées par la piqûre de morphine que par les réminiscences.

Eh bien, tout ça, on le savait peut-être un peu, mais pas avec une telle précision, pas de la main de quelqu’un qui sait de quoi il parle.

Joli petit bouquin, bien écrit, comme une série de petites valses viennoises, il est aussi très agréablement présenté, avec une iconographie originale. Un tournant dans l’histoire de la psychanalyse ! Désormais, on lira Freud avec ce petit bouquin à côté et, chaque fois qu’on tombera sur un cas clinique, on ira fouiller dans Borch-Jacobsen.

                                                                                                                                                              TN

Mikkel Borch-Jacobsen, Les patients de Freud. Destins. Paris, Editions Sciences Humaines, 24 novembre 2011

Mikkel Borch-Jacobsen, Sonu Shamdasani, Le dossier Freud. Enquête sur l’histoire de la psychanalyse. Paris, Le Seuil-Les empêcheurs de penser en rond, 2006.

29 réflexions sur “• On ne lira plus jamais Freud comme avant… (Mikkel Borch Jacobsen)

  1. Pingback: Désormais… « tobienathan’s Blog

  2. Etant peu au fait de la pratique et des travaux de Freud, je pose la question de savoir si ce livre remet en question le bien fondé des théories freudiennes.

  3. Pourquoi spécialement les patients de Freud ? Pourquoi pas un livre sur les patients de la psychiatrie en général dont nombre se sont suicidés, ont été internés, etc… ????
    Pourquoi s’acharner contre Freud et faire croire qu’il est le seul à supporter les graves échecs de la discipline ?

    • un livre sur les patients de la psychiatrie serait aussi très intéressant, bien sûr ! Il y en a eu un certain nombre. Celui de Sue Estroff, Le labyrinthe de la folie, était à la fois extrêmement précis et appliquait de plus une méthodologie subtile et surprenante. Mais je pense qu’il y en a eu des dizaines…

  4. Freud a été le premier dans cette discipline, oui, les effets ne sont pas assurés à 100% . Et puis 31 cas sur le nombre de patients, c’est triste bien sûr, mais cela reste un pourcentage très faible .
    La psychanalyse , c’est comme la Kabbale, elles ne concernent pas tout les
    patients, elle est dangereuse . Aujourd’hui aussi, des gens se suicident après
    un soin psychanalytique .
    Sauf erreur de ma part Anna O. était amoureuse du Dr Breuer, qui l’a abandonnée pour éviter des histoires de couples et c’est Freud qui a repris le relai .
    C’est un livre que je ne lirai pas, il y a eu des précédents .

    • 1) Worms ignore sans doute qu’une grande partie des Archives Freud reste secrète et qu’il n’y a quasi pas d’autres patients que ceux ici présentés sur lesquels on a des informations fiables. Bien évidemment si Freud avait remporté des succès, il aurait publié ces cas sans hésiter. Dans le peu de cas qu’il a publié pour illustrer sa méthode, il dû publier même des cas qui ont foiré (comme l’Homme aux Loups) ou dont le traitement a été interrompu (comme dans le cas de Dora).

      2) Worms ne connaît pas grand-chose à l’histoire de la psychanalyse. Tous les psychanalystes savent que Freud n’a jamais rencontré Anna O, mais en a seulement entendu parler par Breuer et par sa femme.

      3) « C’est un livre que je ne lirai pas, il y a eu des précédents ». Jusqu’à présent, il n’y a eu aucun ouvrage qui présente autant de cas (31, alors que la plupart des ouvrages parlent toujours d’une dizaine !), pour ne pas parler de la rigueur du travail d’historien, qui est exemplaire et exceptionnelle

  5. > C’est un livre que je ne lirai pas, il y a eu des précédents .

    Et après ça, on dit que la psychanalyse forme des gens ouverts d’esprit…
    Quelle sinistre farce !

  6. Pingback: Mikkel Borch-Jacobsen – Les patients de Freud (2011) ♥♥♥♥ – Igor Thiriez

  7. J’ai lu cet article avec intérêt mais si je peux me permettre une question, la voici. Vous semblez prendre fait et cause pour Mikkel Borch-Jacobsen qui démontre selon vous que les cas de Feud étaient « bidonnés ». Quoi qu’il en soit, dans ces conditions pour le moins choquantes et inattendues, qu’est-ce qui prouve, toujours selon vous, que le travail de Mikkel Borch-Jacobsen concernant les patients de Freud, est quant à lui digne de foi et représentatif d’une authenticité historique incontestable ?
    Vous remerciant d’avance pour votre réponse.

    • Bonsoir,

      Vous pouvez lire, pour compléter votre information, Le Dossier Freud du même Mikkel Borch-Jacobsen, écrit avec Sonu Shamdasani, paru aux Empêcheurs de penser en rond en 2006, vous y trouverez toutes les références et les moyens de remonter aux sources. Il s’agit d’un véritable travail d’historien, à partir de l’exploitation des archives, au fur et à mesure qu’elles se trouvent disponibles. Le travail de Mikkel est impeccable. TN

    • Borch-Jacobsen n’est pas le premier historien de la psychanalyse qui montre que Freud ne réussissait pas à traiter les problèmes quelque peu sérieux et qu’il a tenté de maquiller ce fait. Un des premiers historiens de la psychiatrie qui l’a montré est Henri Ellenberger, pourtant lui-même psychanalyste freudien au départ.
      Pour en savoir plus sur cet auteur et sur son ouvrage, qui demeure une référence majeure, même pour les psychanalystes, voir :
      http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1527

      Il a été suivi par Sulloway, historien des sciences, Franck Cioffi, professeur d’épistémologie, et bien d’autres, avant que Borch-Jacobsen n’entreprenne à son tour d’examiner cette question.

      Si vous voulez refaire vous-même ce travail, commencez par lire les lettres de Freud à Fliess, dans l’édition intégrale parue en 2006 aux PUF (et non l’édition expurgée parue en 1950). Vous verrez à quel point Freud était optimiste, mais n’obtenait pas du tout les résultats escomptés et racontés.

  8. Tobie j’apprécie vos écrits, votre style limpide et votre dernier écrit, l’ethnoroman, que je n’ai pas laché pendant deux jours. J’apprécie moins quand vous écrivez « Si vous tenez à lire des psychanalystes, essayez « Savoir attendre : Pour que la vie change » de François Roustang » En effet vous êtes suffisement avisé pour savoir que François Roustang ne pratique plus la psychanalyse et qu’il ne se prétend plus psychanalyste tout comme vous.
    C’est à force d’écarts avec la vérité que l’on perd sa crédibité, dommage.

  9. Le commentaire de Juan renvoie à la question « qu’est-ce que la psychanalyse? » Le dévoué Jones répondait candidement à cette question : «Quand tant de choses circulent sous le nom de psychanalyse, notre grande réponse aux enquêteurs est “la psychanalyse, c’est Freud”». Mais ceci n’est qu’une opinion parmi beaucoup d’autres.

    Le mot « psychanalyse » a désigné la méthode de Breuer avant la méthode des associations libres de Freud. Plus fondamentalement, le mot allemand utilisé par Freud traduit simplement l’expression « analyse psychologique », en usage depuis Condillac et utilisé abondamment par Janet bien avant que Freud ne l’emploie. « Psychanalyse » et « freudisme » ne sont pas davantage synonymes que « christianisme » et « catholicisme romain ». L’éditeur de la collection « Que sais-je ? » a été bien inspiré en publiant d’une part « La psychanalyse » et d’autre part « Le freudisme ». Le freudisme n’est qu’une des innombrables formes de d’analyses psychologiques ou de psychanalyses. Vu la polysémie du mot « psychanalyse », il est préférable d’utiliser des termes comme « freudisme », « lacanisme », « jungisme », « kleinisme », «ericksonisme», « comportementalisme », etc., que le terme générique. Moi-même je me définis comme comportementaliste (après avoir été freudo-lacanien) et je déclare, avec raison, que je fais de l’analyse psychologique et, pourquoi pas, de la psychanalyse. J’observe et j’analyse des processus psychologiques avant de proposer des solutions.
    Pour en savoir plus sur la question de ces définitions, voir :

    http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1538

  10. Mon propos s’adressait à Monsieur Nathan à moins que vous soyez une poupée et que Tobie Nathan soit ventriloque…sinon ce n’est pas sa réponse, d’autant plus que vous répondez à côté…, si votre « pseudo-sciences .org » est du même tonneau merci ! Effectivement en « pseudo » vous vous y connaissez, pseudo Nathan et peudo-réponse dans un seul message!
    Garder vos leçons pour vous je ne vous ai pas sollicité et que vous hantiez systématiquement les forums où il est question de psychanalyse pour faire votre pub n’y changera rien.
    Mon propos ne renvoie pas à « qu’est-ce que la psychanalyse », vous parlez non seulement à la place de Nathan, à la place de Roustang mais aussi à la mienne, on a pu reprocher à Freud de trop interpréter, dans le sens de mettre ses mots avant que ses analysants trouvent les leurs, là vous le battez sans conteste, vous détournez ma question, à quelle fin ? La noyez ? L’annuler ? Roustang, ne se dit plus psychanalyste et depuis longtemps, il l’a dit, moi je ne parle pas à sa place, Nathan fait une erreur factuelle, ce qui n’est peut-être pas pour rien, comme qui disait « les faits ont la tête dur » et vous avez beau les tordre vous n’y pouvez rien, même à vous dire psychanalyste ! Pour le coup, ce qui au moins à quelque effet comique de votre part mais après tout qui sait ? Un « comportementaliste-psychanalyste » voilà qui va plaire, un néologisme que vous devriez faire breveter ! De qui vous moquez-vous ainsi, avez-vous donc aucun respect pour vos lecteurs ?
    Moi, je me moque, finalement, mais de vous, vous appelez à ça en retour de votre message irritant.
    Il y a peut-être dans votre quête obsidionale la marque d’une présence permanente de psychanalystes qui ne vous quitte pas, vous en voyez partout au point de vous y croire, ils vous ont envahi par l’esprit et par le corps. Vous pouvez Demander à Nathan de vous désenvouter, il s’y connaît…

  11. Manifestement je dérange le psycho-correct français, j’irrite, je fais perdre le calme. Je le regrette. Mon but est seulement d’éclairer les pauvres gens qui, en matière de psychologie, ne connaissent que des freudaines et des lacâneries.
    Je me réjouis de voir un défenseur du freudisme ou du lacanisme qui croit qu’il y a des faits. C’est rare. C’est tout à son honneur. Toutefois, je répète que je fais de l’analyse psychologique et que je puis donc me prétendre psychanalyste (non plus freudo-lacanien comme autrefois), mais psychanalyste comportemental. Freud a essayé de breveter le mot «Psychoanalyse» (des auteurs de langue allemande se gaussaient de sa méconnaissance de la formation de mots et parlaient, en allemand, de «Psychanalyse» comme on dit «Psychiatre» et non «Psychoiatre»). Freud n’y est pas parvenu. En 1920, Ernest Jones s’en désolait et écrivait au Comité secret: «Sur la base de divers rapports que j’ai eus dernièrement d’Amérique et de la lecture de la littérature récente, je suis au regret de dire que j’ai une très mauvaise impression de la situation là-bas. Tout et n’importe quoi passe pour de la psychanalyse, pas seulement l’adlérisme et le jungisme, mais n’importe quelle sorte de psychologie populaire ou intuitive. Je doute qu’il y ait six personnes en Amérique qui puissent dire quelle est la différence essentielle entre Vienne et Zurich, du moins clairement». Il n’y a que dans « La France freudienne » que psychanalyse = freudisme. C’est navrant.

    Pour éclairer ce passionnant échange, je recommande la lecture du magnifique ouvrage de Michel Onfray :
    http://mo.michelonfray.fr/non-classe/contre-histoire-de-la-philosophie-tome-8-les-freudiens-heretiques-ed-grasset/

  12. « Eclairer les pauvres gens » cela se passe de commentaires…
    Et je note que vous persistez et signez, pris dans votre monologue vous esquivez ma question en poursuivant votre litanie mais indirectement vous reconnaissez, ça vous échappe, en disant bien qu’il y a les faits, même si c’est pour faire de l’ironie facile, et le fait est que Roustang ne se dit plus psychanalyste, le reste de votre propos ne vise qu’à noyer le poisson en dévidant votre acrimonie infinie vis-à-à vis de la psychanalyse. La psychanalyse comme toute discipline ou pratique doit être critiquer, je ne suis pas un défenseur du freudisme ou du lacanisme qui n’ont pas besoin de mes services, sauf à considérer que relever des erreurs procède du freudisme et du lacanisme, à ce compte-là, toute personne soucieuse de la véracité des faits est un défenseur du freudisme et du lacanisme, même vous, à l’occasion.

  13. Relever des erreurs procède de l’investigation scientifique ou judiciaire, nullement du freudisme ou du lacanisme, disciplines qui n’ont aucun souci des faits observables, mais font du bavardage interprétatif, comme Lacan, à la fin de sa vie, l’a reconnu en un moment d’admirable lucidité. Pour éclairer les non-experts et les naïfs, voir :

    http://icampus.uclouvain.be/claroline/backends/download.php?url=L0xhY2FuLkJhdmFyZGFnZS4xOTc3LnBkZg%3D%3D&cidReset=true&cidReq=EDPH2277

    Si je comprends bien, vous n’êtes pas praticien du freudisme. Vous illustrez ce qu’Yvon Brès a fort bien décrit et que j’ai pu observer un nombre incalculable de fois :
    «On est “pour l’analyse”, on a des “sympathies” pour l’analyse, comme on a des sympathies pour le christianisme ou pour le marxisme, sans jamais passer sur le divan ou en en retardant indéfiniment le moment. Comportement étrange qui, il y a une vingtaine d’années, à l’époque où fut créée la revue Cahiers pour l’analyse, conduisait un analyste en renom, mais peu engagé dans les bizarreries du moment à se demander si les rédacteurs de cette revue se donnaient pour tâche de procurer des clients aux analystes ! Que l’on songe d’ailleurs à la différence entre l’attitude de certains de ces zélateurs avant leur entrée en analyse et l’attitude infiniment plus nuancée qu’ils adoptent au bout de quelques années de divan. Le profit qu’on peut retirer de l’analyse par les voies de l’adhésion extérieure (ne disons pas “intellectuelle”) semble d’un tout autre ordre que celui qu’on acquiert dans la cure. Chez certains patients et chez certains praticiens, on a même l’impression que la part de ce qui vient de l’expérience analytique (sur fauteuil ou sur divan) est bien terne par rapport aux effets de l’adhésion à l’analyse comme idéologie ! » (Intérêt de la psychanalyse, intérêt pour la psychanalyse. Psychanalyse à l’université, 1980, Tome 6, p. 146s).

  14. Le temps a passé et je remercie T. Nathan de m’avoir recommandé Roustang. Sa lecture m’a permise de prendre de la hauteur avec ces vaines querelles de clocher dont je suspecte les protagonistes de viser des « parts de marché ». Pour avoir entendu Roustang sur France culture (Hros champ de L. ADLER) j’ai compris qu’il ne reniait aucun de ses « maîtres à penser » et qu’il assumait de cheminer seul. Je l’imiterai.

  15. Je trouve votre démarche très paradoxale, Mr Nathan, après avoir avoir tout de même théorisé la notion de contre-transfert culturel entre autres, concept qui si je ne m’abuse provient des théories freudiennes. Je trouvais vos théories très intéressantes sur le plan de l’interculturalité notamment. Je me pose la question du pourquoi de ce revirement théorique…Après tout psychanalyse, cognitivo-comportementalisme, neurosciences pour ne citer qu’elles ne peuvent-elles donc pas être considérées comme des théories complémentaires plutôt qu’antagonistes? Pourquoi sommes nous un des seuls pays a persévérer dans ce clivage improductif et tout à fait stérile? Ne perd-on pas de vue le plus important: le mieux être du patient?

  16. Bonjour M. Nathan. Le temps a passé et j’ai lu Roustang « Le secret de Socrate.. ». Cela a été une belle et grande découverte. Je viens également de terminer votre « Psychothérapie démocratique »…surprenant mais bigrement intéressant. Je suis d’accord avec vous, étant psychologue, je sais que les études de psycho sont mal fichues, motivant peut la réflexion personnelle des étudiants pour leur faire avaler toutes crues les thèses défendues par leurs vénérés professeurs. En tout cas, merci pour cette bouffée d’oxygéne qui nous permet de nous extraire des non-débats.

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