Le stade du Zao

Vous rêvez d’incarner Leonardo DiCaprio dans Titanic ? Grâce à cette application qui permet de remplacer facilement et rapidement son visage par un autre sur une vidéo, c’est possible. De quoi bluffer Lacan et dissoudre ce qui s’appelait encore il y a peu l’identité personnelle.

Publié dans : Philosophie Magazine n° 134 de Novembre 2019

Naguère, en psychanalyse, on parlait du « stade du miroir », concept élaboré par Jacques Lacan en 1936. Lorsque l’enfant découvre son reflet dans la glace, à l’âge de 6 mois, prétendait-on, il n’y attache pas plus d’importance que ça ; jusqu’à 1 an, il traite l’image comme s’il s’agissait d’un autre enfant avec lequel il rit ou échange ; mais à 18 mois, il jubile en se reconnaissant enfin. Quelques esprits grincheux avaient posé la question, naïve : « Mais comment donc l’enfant prend-il conscience de son “je” dans des milieux dépourvus de miroirs ? » Et on répondait à ces béotiens que le regard de l’autre accompagné d’une parole en faisait office. Comme s’il était trivial de s’interroger sur de vulgaires objets concrets.Tout cela, c’était avant ! Avant l’invention du smartphone. Aujourd’hui, chaque bébé est filmé plusieurs fois par jour, constamment mis en présence de son image, et cela dès sa naissance. On le filme, on lui montre, on le filme regardant les images le représentant,…

une chronique de TOBIE NATHAN

à lire dans Philosophie Magazine

Flyboard Air. Le turbo-chamanisme

Dans Philosophie Magazine N°133 — octobre 2019

Les yogis lévitent et les chamans laissent leur esprit tutoyer les étoiles. Et si Franky Zapata, l’homme qui a traversé la Manche cet été sur une plateforme volante équipée de réacteurs, était leur héritier ?

Il existe de par le monde deux types de relations avec les dieux et donc deux types de prêtres. Ceux qui érigent un autel, modeste bâtisse ou somptueuse cathédrale, et invitent les divinités à y descendre en leur promettant libations, sacrifices et prières, et ceux qui préfèrent leur rendre visite dans leurs territoires éloignés, au-delà du ciel, en passant par « l’orifice de l’étoile polaire ». Ces derniers, on les appelle chamans, d’un mot d’origine toungouse (une langue sibérienne), devenu terme générique pour désigner ces prêtres que l’on rencontre chez les Yupiks de Sibérie ou chez les Indiens d’Amérique, dans le taoïsme chinois ou le yoga du Népal…Comment le chaman parvient-il à monter si haut et à en revenir si vite ? Quel est son véhicule ? En ce qui concerne les peuples amérindiens, la réponse est connue. Pour s’élever dans les airs, ils consomment des substances et, première entre toutes, le tabac. On peut voir les chamans tirer des bouffées d’énormes cigares de tabac brut…

Montage à partir du « songe d’Icare », tableau de Sergueï Sergueïevitch Solomko (1867-1928)

La suite dans Philosophie Magazine N°133